Ceux qui sont venus par la mer...
Tout comme bons nombre de migrants arrivaient aux Etats Unis par le centre d'Ellis Island à New York, nos grands parents polonais candidats à l'émigration vers la France étaient, pour beaucoup, recrutés à Myslowice en Pologne puis parcouraient près de 2000 kilomètres en train (soit à peu près 44 heures de voyage) pour être parqués au camp de Toul en Meurthe-et-Moselle avant de recevoir une affectation de travail soit dans les mines, soit dans les exploitations agricoles.
A partir de janvier 1923, avec l'occupation de la Ruhr par la France, les choses se compliquent. Cette occupation de la Ruhr manque de tout remettre en question puisque, à titre de représailles, l’Allemagne refuse de laisser circuler les convois de Pologne à travers son territoire.
Ce blocus durera treize mois. Le trafic ferroviaire ne reprendra normalement qu’en mars 1924. Pendant ce temps, seuls les travailleurs originaires de Westphalie arrivent encore à Toul.
Le transit des voyageurs et des marchandises entre la Pologne et la France étant rendu impossible par l’obstruction des autorités allemandes, les mouvements Dantzig-Dunkerque et Dantzig-Le Havre ont pris une importance considérable.
Le Comité des Houillères Françaises qui recevait précédemment ses immigrants Polonais par la Station de Toul, s’est mis d’accord avec la Compagnie Worms puis la Compagnie Générale Transatlantique pour le transport par mer de ces immigrants, et plusieurs paquebots ont été affectés à cette nouvelle ligne régulière faisant 4 à 5 départs par mois entre Dantzig et Dunkerque, et amenant régulièrement entre 1.000 et 2.000 immigrants par voyage.
Le Réveil du Nord - 30 mai 1923
Les formalités de recrutement sont alors remplies à bord par un représentant du Ministère du Travail, avant l’arrivée à Dunkerque ou au Havre, ports de débarquement. Le transport par bateaux présente beaucoup d’aléas.Arrivée de familles polonaises au port de Calais en 1923
La compagnie Worms qui assure habituellement la liaison Dantzig-Dunkerque-Le Havre se retire car ses cargos, conçus pour le trafic des marchandises, ne comportent pas les équipements nécessaires à la prise en charge de passagers.
La Compagnie générale Transatlantique met à la disposition du Comité Central des Houillères. deux paquebots de 5 000 à 6 000 tonnes, le "Pologne" et le "Virginie", susceptibles d’embarquer chacun 800 à 900 personnes.
Mais le système manque de souplesse ; en cas de surnombre, on ajoute un wagon à un train ; ici, l’entassement a ses limites. Certains paysans, des femmes surtout, s’effarouchent et à la dernière minute renoncent à partir, craignant le mal de mer; il faut sans cesse refaire les listes.
Port et gare maritime du Havre
Dantzig à cette époque, avait le statut de ville libre mais était majoritairement peuplée d'Allemands. La Pologne avait, grâce au Traité de Versailles, gagné son accès à la mer.
La décision de construire un grand port de mer à l’emplacement du village de Gdynia fut prise par le gouvernement polonais pendant l’hiver 1920, en raison de l’attitude hostile des autorités de Dantzig et des ouvriers du port qui cherchaient à empêcher les armées alliées de fournir une aide militaire à la Pologne pendant la guerre polono-soviétique de 1919-1920.
La construction commença en 1921et le premier grand bateau de haute mer y accosta le 13 août 1923.
Complètement opérationnel en 1926, c'est depuis ce port de Gdynia que s'effectueront dorénavant les transports d'immigrés jusque Dunkerque et Le Havre.
En tous cas, il deviendra très vite nécessaire d’ouvrir un troisième camp de recrutement de main d'oeuvre non loin de la Baltique. Wejherowo, près de Gdynia, inauguré au cours de l’été 1923, n’était pas conçu pour durer mais comme solution de dépannage. En fait, il aura longue vie.
Néanmoins, si Mysƚowice va se développer, Wejherowo restera marginal.
Contrairement aux archives américaines, où les manifestes des navires avec les listes de passagers débarqués à Ellis Island sont consultables en ligne, je n'ai rien trouvé de tel aux archives de Dunkerque ou du Havre, il en est de même pour le camp de Toul.
Peut-être un jour....
Sources : "Polonais méconnus" ed.de La Sorbonne. Zbiory NAC-Archives Polonaises - Retro news. BNF Gallica -Wikipedia - Centre historique minier de Lewarde
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